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Beauté moscovite

La semaine dernière, j’ai fait avec ma femme un voyage de groupe exceptionnel à Moscou en Russie. Certains trouvent étrange que mon épouse et moi puissions aimer ce genre de voyage. Cependant, c’est ne pas voir tous les avantages qu’il y a à voyager ainsi. C’est tellement pratique de se laisser porter sans devoir s’occuper des problèmes pratiques ! Pourtant, si voyager en groupe conduit souvent à vivre d’inoubliables moments, cela peut également conduire à en vivre de très mauvais. Surtout les premières fois, quand on n’en connaît pas les règles. De manière générale, et même si l’on apprécie la vie en communauté, il faut veiller à se protéger. Ce n’est pas parce qu’on voyage en groupe qu’on est esclave du groupe. Il est au contraire important de garder des moments de pause pour soi. Si l’on ne pose pas les limites, on se fait facilement bouffer et ça peut rapidement devenir désagréable. On ne s’en rend pas forcément compte les premiers jours. On découvre le pays, et chacun fait des efforts pour se sociabiliser. Mais le quotidien finit fatalement par reprendre ses droits et chaque participant retrouve alors ses habitudes… ainsi que les défauts qu’il avait soigneusement cachés. C’est là qu’il devient essentiel de s’arracher du groupe, en s’accordant une escapade à l’écart des autres. C’est ce que nous faisons toujours avec ma femme, histoire de souffler un peu. Après, il y a une autre vérité qu’il faut intégrer : on ne peut pas apprécier tout le monde. Il faut éviter de se polariser sur les gens qu’on a du mal à supporter. En ce qui me concerne, j’ai du mal à supporter les retardataires qui, à chaque rendez-vous, sont toujours à la bourre, et n’éprouvent aucune gêne à bloquer tout le monde. Si j’avais voix au chapitre sur cette question, je partirais à l’heure pile et les abandonnerais sur le bord de la route, même (voire surtout) s’ils étaient au milieu de nulle part. Mais j’ai fini par intégrer que quel que soit le groupe, on trouve toujours des personnes de ce genre. Ca doit être une résultante de la loi de Murphy : quand il peut y avoir un retardataire dans un groupe, il y sera forcément. Ca ne vaut pas la peine de gâcher son voyage pour si peu. Quoi qu’il en soit, si l’occasion se présente, je vous invite à faire ce voyage de groupe à Moscou. Je ne m’étais pas autant amusé depuis longtemps. Et ce, malgré ces foutus retardataires ! Encore plus d’information sur l’organisateur du voyage groupe en Russie en cliquant sur le site de l’organisateur.

En finir avec le tabac

Le tabac et son usage sont plutôt mal vus par les temps qui courent. Non sans raison, si l’on en croit la science. Mais il n’en a pas toujours été ainsi et ce n’est pas sans étonnement qu’un contemporain peut découvrir ce qu’en pensaient des personnalités faisant autorité il y a quatre siècles, quelques décennies après que ces feuilles exotiques aient été introduites en Europe. Le premier Européen à faire état du tabac est Christophe Colomb lui-même. Le 28 octobre 1492, étant en vue de l’actuelle Cuba et ayant envoyé une reconnaissance à terre, il note dans son journal que « ces envoyés rencontrèrent en chemin beaucoup d’Indiens, hommes et femmes, avec un petit tison allumé composé d’une sorte d’herbe dont ils aspiraient le parfum« . Ils nommaient cette herbe tobaco. D’autres navigateurs rendront compte de la même coutume chez nombre de peuplades de l’Amérique tropicale. Même si des marins s’essaieront à les imiter, c’est sur une autre base que le tabac sera diffusé en Europe à partir de 1560, en particulier par le Français Jean Nicot. Celui-ci, ambassadeur du roi de France auprès de la cour de Lisbonne, a découvert le tabac dans le jardin botanique du roi de Portugal, riche d’espèces apportées du Nouveau Monde. Il s’entend dire que les Indiens en font un usage médical et c’est dans cet esprit qu’il en expédie en France, en avril 1560, sous forme de poudre de feuilles séchées, dans le but de soulager les migraines dont souffre le reine-régente Catherine de Médicis. Apparemment, ça marche puisque le peuple surnommera « l’herbe à Nicot » la catherinaire et que le bruit se répand qu’il s’agit d’une plante miraculeuse. Le succès ne tarde pas et la culture se développe dans la catégorie des « simples » (les plantes médicinales). Aucun végétal provenant d’Amérique, même le maïs (pour ne rien dire de la pomme de terre), ne connaît une aussi rapide diffusion, d’autant que le tabac possède une remarquable capacité d’acclimatation. Si l’usage récréatif s’avère important (on fume le tabac dans le peuple, on le prise sous forme de poudre dans la haute société), il se trouve légitimé par les qualités thérapeutiques que des sommités du corps médical ne manquent pas de mettre en avant dans la première moitié du XVII° siècle. Non seulement il est rappelé (à tort) que les Indiens d’Amérique en usent comme antidote au venin des serpents, mais il se colporte l’idée que le tabac serait la panacée qui guérit tout, la népenthès des Grecs, comme l’affirme en 1614 le médecin écossais William Barclay. Cinquante ans plus tard, le Français Baillard, dans son « Discours du tabac« , parle d’un miracle de la nature. C’est pourtant l’Allemand Johan Neander qui sera le plus explicite. En 1622, il publie à Leyde le traité latin « Tabacologia« . Non seulement, il pose que le tabac guérit les affections les plus diverses, mais il en définit les modalités d’utilisation en poudre, en sirops, en cataplasmes et évidemment en fumigation. C’est ainsi qu’il propose une singulière méthode pour traiter les « suffocations de matrice » des femmes : » la malade sera disposée sur une selle percée pour recevoir le parfum de tabac d’un réchaud disposé par-dessous. On mettra par dedans la selle un conduit de telle grandeur que le tuyau qu’on aura enchassé puisse atteindre jusqu’à l’orifice de la matrice pour y conduire la fumée venue d’en bas« . Non seulement, pour Neander, le tabac guérit, en particulier les maladies du poumon, mais il est radical pour exterminer les rats, souris et punaises, ce qui sous-entend qu’il est également hautement toxique. Mais derrière Galien et Paracelse, Neander postule que les médicaments sont en réalité des poisons dont les effets ne sont favorables que sous le contrôle du médecin. C’est en cela que dès le XVII° siècle, des réserves apparaissent quant à l’usage festif du tabac, présenté lui comme dangereux. « les jeunes, écrit Neander, doivent apporter une grande circonspection en prenant cette fumée car son usage trop long et trop fréquent fait déchoir le cerveau de sa bonne constitution« . Et il redoute même des conséquences funestes pour la descendance : « ce malheur ne s’arrête pas sur ces enfumés seuls, il retombe sur leurs descendants vu que le tempérament et la constitution des parents se communique par droit de nature aux enfants« . Cela ne freine cependant pas l’engouement général. « Et qui vit sans tabac est indigne de vivre! » s’exclame Sganarelle dans le « Dom Juan » de Molière. Et il ajoute même que le tabac « instruit les âmes à la vertu et [que] l’on apprend avec lui à devenir honnête homme« . Rien de moins!